Ce que je suis:
J’ai foi en la race humaine, en sa capacité à se montrer noble. Mais je crois aussi en sa capacité à se montrer odieuse avec son prochain. Je me situe entre les deux. Il faut savoir s’adapter pour survivre et survivre est un art qui n’est pas donné à tous.

Je suis têtue, acharnée. Je me montre intransigeante quand je sais que l’idée est mauvaise. Beaucoup de gens sont bien trop pressés. C’est ce qui les perd. Je suis patiente, pour tout. Pour réussir, la patience est un atout. Je suis patiente quand il s’agit de vengeance, quand il s’agit d’objectifs, quand il s’agit du quotidien. Ne jamais rien faire d’inconsidéré. Saut s’il s’agit de se saouler entre amis, enfin… pas toujours, parfois, réfléchir avant est une bonne chose.
Je ne recule pas, jamais sauf si un repli tactique est obligatoire. Autant que faire se peut, je ne recule jamais. Je ne me soumets jamais et ce, quelles que soit les circonstances. Se plier sans raison à la volonté d’un autre, c’est perdre foi en sa propre capacité, en sa personne. J’ai confiance en moi et ça, personne ne pourra jamais me l’enlever. La dignité, la confiance en soi sont des choses à protéger et à chérir. Il ne peut en être autrement à mon sens.

Vu comme ça, on pourrait croire que je n’ai aucun défaut, que je suis parfaite. Surtout pas ! J’ai un caractère de cochon et en plus… je suis tête en l’air. J’oublierais ma tête si elle n’était pas accrochée à mes épaules. J’oublie toujours quantité de choses avant de partir de chez moi. Heureusement, je me connais bien et je ne suis jamais en retard grâce à ça. Croyez-moi, si je ne me connaissais pas si bien, je ne serais jamais à l’heure ou que ce soit.

Ce que l'on dit de moi:
Je pense que l’on dirait de moi que je suis une forte personnalité. Un peu trop têtue, trop téméraire peut-être.

En vérité, je dois avouer que je n’ai jamais vraiment fait très attention à ce que l’on pouvait dire à mon sujet.

Oh si ! Il y a quelque chose qui revient très souvent. Sous mes dehors de femme active, sûre d’elle et tout le tralala, les gens pensent que je suis trop réservée, que je ne me dévoile pas assez.
Et vous savez quoi ? Ils n’ont pas tout à fait tord.

Mon passé c'est toute une histoire:
Je ne suis pas née sous le nom de Lyssa Xanthe Hathael… Je suis née sous le nom de Lynn Gisborne à New York. Je ne suis pas née dans un milieu aisé, ni même ce qu’on appelle une famille de classe moyenne. Je crois que dans mon cas, on peut parler de basse fosse… J’étais dans ce qu’on peut appeler, la lie de la société.
Oh, quand je suis née tout allait bien, j’avais un père, Andrew et une mère, Patience, j’avais même un grand frère, Jasper ! Mais mon père a été tué dans un braquage quand j’avais cinq ans. Ma mère est devenue un fantôme en chair et en os. Elle ne s’occupait plus de rien, elle… errait… Elle se laissait traîner par la vie.
Quand j’ai eu sept ans, elle a perdu son emploi et mon frère, du haut de ses douze ans, a commencé à devoir s’occuper de moi. Les études ont commencé à passer au second plan. Personne ne se souciait de nous et c’est là qu’on est tombé bien bas. On devait voler de temps en temps, on n’allait pas toujours en cours. Lui il traînait à la salle de jeu et moi à la bibliothèque. J’avais déjà conscience que je ne resterais pas dans ce cercle vicieux de demi-vie dictée par l’argent.

Rapidement, je me mis à haïr ma mère… La haïr au plus haut point. Je me mis aussi à haïr chaque petite frappe, chaque voleur, chaque petit truand. Je ne m’aimais pas beaucoup non plus… je devais voler, je n’avais pas le choix.

Et ensuite notre mère est morte… morte à force d’attendre, morte par oubli. J’avais onze ans… Jasper en avait seize et il a du tout lâcher pour qu’on ne nous sépare pas. Je continuais à aller en cours, je continuais à aller à la bibliothèque, je voulais m’en sortir. Mais il faut croire que quand on est né sous une mauvaise étoile, on ne s’en sort pas si facilement. Mon frère a commencé à boire, à se droguer. J’étais encore trop jeune pour ramener de l’argent à la maison et je volais mal… Il s’est mis à me frapper deux ans après la mort de notre mère.
C’est pendant cette période que je l’ai rencontré… Lachlan… Je sortais de la bibliothèque, je ne regardais pas où je marchais, je suis tombée, il m’a aidé à me relever. J’avais quatorze ans. On s’est souvent croisé après ça. Je suppose qu’il savait que mon frère était violent. Ça devait se voir parfois… Mais il a toujours eu la délicatesse de ne pas m’en parler. Il était mon seul ami, il m’encourageait, me réconfortait et moi je l’écoutais, je lui parlais de tout, de rien bien que je n’osais pas lui parler de mon frère. J’avais peur pour lui, j’avais peur pour moi.

Je me disais que Jasper avait raison, que j’étais une bonne à rien et puis j’ai compris… J’ai compris que je n’y étais pour rien. Alors je me suis rebellée. Le coup le plus violent que j’ai jamais reçu, c’est à quinze ans. Il m’a frappé si fort à la tête qu’il m’a ouvert l’arcade sourcilière. Ce jour-là, aux urgences, on m’annonçait que j’avais perdu quatre-vingt cinq pour cent de mon œil gauche. Je disjonctais. La meilleure chose qui me soit arrivée d’après moi. On m’arracha à mon frère violent et on me plaça en hôpital psychiatrique pour gérer ma dépression, les traumatismes de la perte de mes parents. Ce qui m’ennuyait… c’était que je n’avais aucun moyen de prévenir mon ami. Je ne l’oubliais pas, je me faisais une raison.
J’en sortais trois ans plus tard. Mais j’avais eu le temps d’apprendre quelques petites choses. Premièrement, je ne serais plus jamais faible. Deuxièmement, j’avais bien assez de connaissance en matière d’art. Troisièmement, j’allais vivre libre. Et finalement… Je ne reverrais jamais plus mon frère mais je n’oserais pas non plus retourner aux endroits où on se retrouvait avec Lachlan. Mon frère était un personnage que je préférais oublier, j’aurais bien été capable de le tuer… mais pas Lachlan. Lachlan m’avait tant aidé que j’avais du mal à me faire à l’idée de ne plus le voir.

C’est à cette époque que j’ai commencé à faire de faux tableaux. J’étais douée, ça se vendait mieux que bien. Mais j’étais lente… Mon œil était un handicap alors avec mon argent, je me suis fait opérer à dix-huit ans, je voulais de meilleurs yeux, je voulais réfléchir plus vite tout en sachant qu’il y avait des risques. C’était jeune et j’ai dû déployer des trésors d’arguments pour que l’homme accepte de faire ces modifications. Mais elles étaient nécessaires. Ma salle d’op’ était une belle chambre d’hôtel et j’ai eu de la chance, tout c’est bien passé.
Je suis devenue encore meilleure dans mon domaine mais c’est bien connu, même les meilleurs se font prendre… Sans éducation à proprement parler, je trouvais que je ne m’étais pas mal débrouillée et je n’étais pas la seule, on me laissa face à un choix. Soit j’allais en prison pour un sacré bout de temps. Soit on me réinsérait, on m’offrait de belles études, un super job, une nouvelle identité et une nouvelle vie. C’est ce qu’on appelle une page tournée… mais à cette période, je venais d’avoir tout juste vingt-et-un ans.
N’étant pas idiote, j’ai choisi la seconde tout en étant mise à l’épreuve évidement. Je ne devais pas récidiver ou alors, ne pas me faire prendre. Je n’ai pas tenté le diable. À vingt-trois ans, j’étais déjà diplômée d’une des plus prestigieuses écoles d’art. Évidement, j’avais brillé en authentification et en rénovation. Je n’étais pas mauvaise en datation et en classement mais l’authentification, ça c’était mon truc. Inutile de dire que je n’avais révélé mon petit secret à personne. Tout cela reste parfaitement illégal après tout.

C’est trois semaines après avoir été diplômée que j’ai eu la surprise de ma vie… Un café renversé sur ma chemise un matin en allant au travail, un homme… Je ne l’avais pas vu depuis des années mais je savais qui s’était. Et au lieu de m’emporter, je lui ai sauté au cou. C’était Lachlan. Mon meilleur ami venait de renverser son café sur moi et c’était un jour merveilleux.
Depuis, de l’eau à couler sous les ponts, je l’ai mis au courant de tout en lui demandant de ne pas en parler. J’étais Lyssa Xanthe Hathael, Lynn Gisborne était morte. On a fini par se prendre un appartement tous les deux à Toronto… histoire de s’éloigner de mon passé au maximum… Toronto est une belle ville et l’art y est tout aussi prometteur.

Et maintenant… Les Search Games… Il fallait que j’en sois. J’ai prévenu mon employeur, j’ai pris un congé sans solde et je me suis inscrite. J’avais besoin de prouver ma valeur, c’était aussi une opportunité formidable. J’aurais des objets d’art inconnus entre les mains et l’art m’avait sauvé la vie.
Je devais garder secrètes mes modifications, trouver des excuses pour mes maux de crâne, ma sensibilité périodique à la lumière, mes soit disant cauchemars qui n’étaient en fait que des souvenirs trop vivaces, ma distraction quand ma vue était meilleure que ce qu’elle devait être et qu’un insecte m’était visible comme si je regardais un chat… mais ce n’était que des problèmes mineurs. Je devais faire mes preuves aux Search Games.