Les fêtes. Ce n’était pas que je n’en raffolais pas mais… ça n’était pas mon fort. J’étais d’un ordinaire timide, et s’il y avait bien quelque chose que je ne supportais pas, c’était de me retrouver bourrée devant une bonne moitié de personnes que je ne connaissais ni d’Eve ni d’Adam. Croyez bien que ça ne m’était quasiment jamais arrivé. Déjà par principe, je ne comprenais pas l’engouement à se retrouver dans un état pareil. Dans soixante-dix pour cent des cas, on finissait par tout recracher, pour être polie. Et je ne vous parle pas de la gueule de bois qu’on se payait le lendemain. Non, définitivement, boire, ce n’était pas mon truc. Et si faire la fête pouvait être plaisant, j’étais bien souvent fatiguée tôt ; d’autant que danser avec des gens qu’on ne connaissait pas était doublement ridicule. Alors j’avais décidé de traîner un peu avant de rentrer dans le bâtiment. Si le public avait finalement disparu, les journalistes et autres stylistes avaient rejoints les participants pour faire la fête. L’ambiance était déjà affolante, et les tables remplies de bouteilles, autant de sodas que d’alcool, ou de choses à manger. J’attrapai un verre dans lequel je versai… du cidre. Oui, je n’aimais pas le champagne, et j’avais envie de paraître un peu plus sophistiquée qu’une jeune femme de vingt-deux ans qui buvait du jus de fruit. Bien que le cidre passait pour du jus de fruit à côté de toutes ces bouteilles de vodka, pastis et autres rhum.

Alors que je remontai une allée de haies, mon verre à la main, l’esprit qui divaguait, je me mis à me demander où mes chefs d’équipe pouvaient bien se trouver. J’aurais bien aimé en savoir un peu plus sur eux avant de démarrer à course. Ilyan, l’un d’eux, m’avait étrangement inspiré confiance. Alors même si je n’avais pas atterri dans l’équipe de mon pays d’origine, ça n’était pas plus mal, et je m’y sentais bien. Je voulu porter mon verre à ma bouche lorsqu’on me bouscula. J’éloignai le contenant de moi pour ne pas me salir au cas où le cidre eut la bonne idée de se faire la male. « Hum... Je suis désolée de t'avoir bousculée, j'ai la tête dans les nuages parfois... euh... On ne serait pas dans la même équipe toutes les deux ? L'Australie ? » Je dévisageai la demoiselle qui se trouvait face à moi, complètement paniquée. Son visage me disait effectivement quelque chose, mais je n’étais pas certaine que nous étions dans la même équipe. Nous avions croisé tellement de gens dans la salle de composition des équipes, puis devant Sinoth qu’il m’était encore impossible d’identifier tout le monde et d’associer les gens à leur équipe. Mais avant que j’aies pu répondre, elle enchaîna.

« Enfin en tous les cas, je suis ravie de faire ta connaissance ! Je m'appelle Victoria Hooker et je suis mécanicienne pour l'équipe de l'Australie. » Elle avait donc vu juste. Un sourire s’étira sur mes lèvres et je lui tendis ma main vide. « Neah Emerson, je suis la cuisinière de l’équipe de l’Australie. » Enfin une première vraie connaissance. Je la rassurai sur le fait qu’elle m’ait bousculée. Tant que je ne m’étais pas salie, tout allait bien. J’avalai une gorgée de cidre et souris comme une bécasse, ne sachant pas vraiment comment me comporter. Rappelez-vous, à la base, je suis timide. Non pas asociale, mais timide. Je ne savais pas quoi dire pour combler les trous, d’ordinaire. Bizarrement, quelques banalités me vinrent naturellement. Peut-être que cette course allait me décoincer, après tout ? « La fête ne t’intéresse pas non plus ? »